La seconde-main : une réponse aux défis environnementaux de la fast fashion ?

La seconde-main : une réponse aux défis environnementaux de la fast fashion ?

Le marché de la seconde-main en plein boom

L’industrie de la mode, notamment le secteur du fast fashion, a longtemps été sous le feu des critiques pour son impact environnemental considérable. Ce secteur, caractérisé par une production rapide et bon marché de vêtements en réponse aux tendances éphémères, est responsable de diverses formes de pollution, allant de la contamination de l’eau aux émissions de gaz à effet de serre, en passant par la production massive de déchets textiles (Dissanayake, 2019). Dans ce contexte, le marché de la mode de seconde-main apparaît comme une solution potentielle pour atténuer les conséquences néfastes de la fast fashion. Cette dynamique soulève une question essentielle : en quoi l’essor du marché de la mode de seconde-main représente-t-il une réponse efficace aux défis environnementaux posés par l’industrie du fast fashion ?

L’essor du marché de la seconde-main constitue une alternative économique et durable face à la consommation de masse encouragée par la fast fashion. En 2023, le marché de la revente atteignait un chiffre d’affaires de 33 milliards d’euros et devrait presque doubler pour atteindre 70 milliards d’euros d’ici 2025 (BPI France). ThredUp prévoit même que ce marché atteindra 350 milliards d’euros d’ici 2028, avec une croissance 11 fois plus rapide que celle du marché global de l’habillement. Ces chiffres illustrent non seulement l’attrait économique de la seconde-main mais aussi son potentiel à transformer les pratiques de consommation vers des modèles plus durables. Des plateformes comme Vinted, leader mondial dans la revente de vêtements, en sont la preuve. Selon ThredUp (2024), d’ici 2025, les ventes de vêtements de seconde-main devraient représenter 10% du marché mondial de la mode, ce qui reflète un changement significatif des attitudes des consommateurs en faveur de la durabilité.

Le comportement des consommateurs européens vis-à-vis de la durabilité a connu une évolution notable, particulièrement accentuée par la crise de la COVID-19. Durant la pandémie, 57% des personnes ont modifié leur mode de vie pour réduire leur impact environnemental, et plus de 60% s’efforcent de recycler et d’acheter des produits plus durables (McKinsey, 2020). En matière de mode, 65% des consommateurs sont prêts à acheter des articles plus durables (Sawers et al., 2020). Cette tendance est reflétée dans l’expansion rapide du marché de la mode de seconde-main en Europe. Cross-Border Commerce Europe prévoit que ce marché doublera d’ici 2025 pour atteindre 34 milliards d’euros (2021). En 2021, 90 millions de personnes ont essayé la revente pour la première fois, contre 16 millions en 2020, illustrant une croissance exponentielle par rapport au commerce de détail traditionnel (Business AM, 2021). Les consommateurs se tournent de plus en plus vers des produits circulaires et durables, avec 45% des acheteurs en ligne ayant déjà acheté un produit circulaire et 70% des acheteurs de seconde-main effectuant leur premier achat de luxe sur des plateformes de revente vintage (Silicon, 2021).

Au Portugal, où le secteur de la mode représentait 5% du PIB en 2020 (Executiva, 2020), les consommateurs montrent une sensibilité croissante aux enjeux environnementaux. Une étude révèle que 95,18% des Portugais considèrent crucial de protéger la santé de la planète (Comunidades Lusófonas, 2021). Cependant, malgré cette prise de conscience, les comportements d’achat restent mitigés. Selon Domingues et Gonçalves (2020), les attitudes environnementales ne sont pas systématiquement étudiées au Portugal, bien que le pays soit particulièrement vulnérable aux changements climatiques. Une étude de BNP Paribas indique que 52% des consommateurs portugais achètent des produits durables, mais seulement 11% optent exclusivement pour des options écologiques lorsqu’il existe d’autres alternatives (Correia, Distribuição Hoje, 2021). Néanmoins, une enquête de showroomprive.pt révèle que 64,73% des consommateurs portugais sont prêts à payer plus cher pour des marques éthiques (Comunidades, 2021), ce qui montre une évolution positive vers des choix de consommation plus responsables.

Lié à un changement des aptitudes d’achat

La croissance rapide du marché de la mode de seconde-main reflète un changement culturel plus profond, où la valeur de la durabilité commence à surpasser celle de la nouveauté et de la tendance. Cette transition est non seulement bénéfique pour l’environnement mais aussi pour l’économie. En allongeant la durée de vie des vêtements, la mode de seconde-main réduit la demande de nouvelles productions, contribuant ainsi à une diminution significative des ressources utilisées et des déchets générés. Une étude de l’Institut de l’environnement de Stockholm a révélé que prolonger la durée de vie d’un vêtement de seulement neuf mois peut réduire son empreinte carbone, ses déchets et son utilisation d’eau de 20-30% (WRAP, 2020).

De plus, le marché de la seconde-main s’intègre dans une économie circulaire, un modèle économique visant à réduire le gaspillage et à maximiser l’utilisation des ressources. En réintroduisant les vêtements dans le circuit de consommation, il participe à la lutte contre le gaspillage textile et les décharges surpeuplées. Selon l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME), environ 700 000 tonnes de vêtements sont jetées chaque année en France, dont seulement 38% sont recyclés (ADEME, 2020). L’essor du marché de la seconde-main pourrait considérablement améliorer ces chiffres en encourageant la réutilisation et le recyclage des textiles.

La seconde-main face au défi environnemental de la fast fashion

Cependant, malgré ses nombreux avantages, le marché de la mode de seconde-main n’est pas exempt de défis. L’un des principaux obstacles est la perception culturelle et sociale des vêtements de seconde-main, souvent associés à des stigmates de seconde classe ou de pauvreté. De plus, l’authenticité et la qualité des produits peuvent poser problème, nécessitant des systèmes de vérification rigoureux pour gagner la confiance des consommateurs. En outre, le marché doit faire face à la concurrence croissante des marques de fast fashion qui cherchent à s’implanter dans le secteur de la seconde-main, potentiellement diluant l’impact positif sur l’environnement.

En conclusion, l’essor du marché de la mode de seconde-main représente une réponse efficace aux défis environnementaux posés par l’industrie du fast fashion. En transformant les pratiques de consommation vers des modèles plus durables et en intégrant des principes d’économie circulaire, il contribue significativement à la réduction de l’empreinte écologique de l’industrie de la mode. Toutefois, pour maximiser son potentiel, il est crucial de surmonter les défis culturels et de qualité, tout en encourageant une plus grande adoption par les consommateurs. Ainsi, la mode de seconde-main peut jouer un rôle clé dans la construction d’un avenir plus durable pour la planète.

Bibliographie

  • ADEME. (2020). La gestion des déchets textiles.
  • BPI France. (2023). Le marché de la revente de vêtements.
  • Business AM. (2021). Les consommateurs et la revente de vêtements.
  • Comunidades Lusófonas. (2021). La conscience environnementale des Portugais.
  • Correia, Distribuição Hoje. (2021). Les comportements d’achat durables au Portugal.
  • Cross-Border Commerce Europe. (2021). Le marché de la seconde main en Europe.
  • Dissanayake, G. (2019). Environmental Impact of Fast Fashion.
  • Domingues, R., & Gonçalves, P. (2020). Attitudes environnementales au Portugal.
  • Executiva. (2020). Impact économique de l’industrie de la mode au Portugal.
  • McKinsey. (2020). L’impact de la COVID-19 sur les comportements de consommation.
  • Sawers, P. et al. (2020). Sustainability and Consumer Behavior.
  • Silicon. (2021). La mode de seconde main et les produits circulaires.
  • ThredUp. (2024). The Future of Secondhand Fashion.
  • WRAP. (2020). Prolonging the life of clothes.

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