La Covid-19, catalyseur d’une nouvelle approche de la relation humain/nature

La Covid-19, catalyseur d’une nouvelle approche de la relation humain/nature

Par: Alexandre Neviaski, Responsable recherche en Sociologie du Droit.

Voilà bientôt deux ans que le premier cas de coronavirus a été détecté et pourtant, le mystère autour de son apparition perdure toujours. Alors que pour certains scientifiques, la pandémie est due à une fuite de laboratoire, la majeure partie de la communauté scientifique s’accorde à dire que l’hypothèse d’une transmission animale est la plus probable. Dans cette perspective, la chauve-souris fut pointée du doigt dès les premiers mois comme étant la responsable de la catastrophe. Ensuite ce fut ensuite au tour du pangolin d’être accusé. Aujourd’hui, à la suite d’une étude menée par l’Institut Pasteur, la thèse de la chauve-souris et plus précisément de la Rhinolophus, est à nouveau celle qui tient la corde. Alors, origine zootique ou erreur humaine ? 

Au fond, est-ce la question essentielle à se poser ? Au lieu de chercher à tout prix un coupable, pourquoi ne pas se demander si la pandémie n’a-t-elle pas été l’acte fondateur d’une prise de conscience mondiale à propos de notre coexistence avec la faune et la flore qui nous entourent ?

Bien évidemment le réchauffement climatique est l’une des menaces mondiales les plus pressantes néanmoins les gouvernants ont compris qu’il était tout aussi indispensable de protéger au mieux les espèces animales. Ainsi la capture d’un million de pangolins sur les huit dernières années a raisonné comme un électrochoc auprès des dirigeants asiatiques. Certes, aucun lien n’a pu être construit entre Covid, pangolin et braconnage, cependant on peut imaginer qu’il est nécessaire de vivre davantage en harmonie avec la faune. 

Ainsi la COP15 pour la biodiversité prévue, d’abord en octobre 2020 puis reportée en 2021 pour être à nouveau reportée en 2022, apparaît comme une arme potentielle pour éradiquer si ce n’est diminuer grandement le braconnage. D’ailleurs la localisation de cette conférence des Nations Unies n’est pas anodine. En effet, elle se déroulera à Kunming en Chine, pays où le premier cas de coronavirus a été détecté mais aussi pays où la situation de nombreuses espèces animales est plus que précaire. 

On peut donc espérer qu’à l’occasion de cette COP, les pays adoptent un nouveau cadre international visant à apporter une réponse politique à la perte de biodiversité mondiale, en mettant l’accent sur les moyens de mise en œuvre. Sans avoir de détails précis sur les engagements précis discutés, on peut noter que la Convention de l’ONU sur la biodiversité biologique a présenté, en juillet, un projet de texte devant être finalisé lors des négociations de Kunming et visant à « vivre en harmonie avec la nature » à l’horizon 2050, avec des objectifs intermédiaires pour 2030.

Il est donc nécessaire que les Etats s’accordent sur trois mesures essentielles et nécessaires s’ils veulent que le texte de la COP 15 pour la biodiversité ait le même impact que l’Accord de Paris.

  • Renforcer l’Etat de droit environnemental

Les États doivent intégrer le droit à un environnement sûr, propre, sain et durable dans leurs cadres législatifs et constitutionnels et prévoir des recours efficaces en cas de violation de ce droit. Concrètement, les autorités peuvent par exemple intensifier leurs efforts dans la lutte contre le commerce illicite d’espèces sauvages, afin de réduire les risques de zoonoses et de promouvoir l’État de droit tout en assurant l’accès à d’autres moyens de subsistance durables.

  • Garantir le droit à un environnement sain

La détérioration de l’environnement et l’érosion de la biodiversité contribuent à l’augmentation des zoonoses qui se transmettent de l’animal à l’être humain et qui peuvent déclencher des épidémies virales. Ces évolutions favorisent également certaines pathologies préexistantes, comme l’asthme, qui rendent les personnes plus vulnérables aux infections virales. Plus de 150 pays reconnaissent le droit à un environnement sûr, propre et sain d’une manière ou d’une autre. Ce droit repose principalement sur un climat sûr, l’accès à des services d’approvisionnement en eau et d’assainissement, un air pur, une alimentation saine et produite de manière durable, des environnements non toxiques, des écosystèmes sains et le respect de la biodiversité. Ces conditions sont indispensables à la santé humaine et à notre résistance aux maladies. Elles sont, en outre, essentielles pour réduire les risques liés aux zoonoses et éviter la multiplication des vecteurs de maladies existants.

  • Repenser la relation entre les humains et la nature

La pandémie de COVID-19 doit tous nous amener à repenser nos interactions avec la nature et la faune sauvage. Environ 60 % de l’ensemble des maladies infectieuses et 75 % de toutes les maladies infectieuses émergentes qui touchent les humains, dont la COVID-19 fait partie, sont des zoonoses. En moyenne, une nouvelle maladie infectieuse apparaît chez les humains tous les quatre mois. La santé et le développement humains reposent sur l’intégrité des écosystèmes. Les changements environnementaux d’origine anthropique modifient la structure des populations animales et réduisent la biodiversité, créant des conditions propices à la prolifération de certains porteurs et vecteurs de maladies et/ou d’agents pathogènes. L’inclusion du droit fondamental à un environnement sain dans les principaux accords et processus environnementaux, tels que le cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020, est cruciale pour apporter une réponse holistique à la crise de la COVID-19. Celle-ci doit nous amener à repenser la relation qui lie les humains à la nature dans la perspective de réduire les risques et d’éviter que d’autres évènements de ce type ne se produisent à l’avenir du fait de la dégradation de l’environnement.

Comment cela pourrait se traduire ?On peut donc imaginer que les Etats-parties s’engagent à combattre plus farouchement le braconnage ou encore la vente d’espèces protégées dans les wet markets, un marché qui vend des animaux vivants ou déjà abattus, qu’ils soient sauvages ou d’élevageCertes ces comportements sont particulièrement présents en Afrique et en Asie néanmoins il ne faut pas oublier que pas plus tard qu’il y a un mois, le gouvernement français n’a pas hésité à remettre en question l’interdiction de chasse de certaines espèces d’oiseau. Comme pour le climat, le combat que les Etats doivent mener est un combat mondial où chaque relation doit être repensée afin d’éviter qu’une catastrophe sanitaire comme celle de la COVID-19 ne se reproduise.

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